Le Ruisseau englouti
de Vincent Lauzon
Je la porte en mon sein depuis le premier jour,
Mélopée onirique au fond de mon sommeil,
Qui la nuit me taraude et m’échappe à l’éveil,
Me laissant haletant, vibrant, épaissi, gourd.
Et j’attends, avalé, là où s’ancre la tour
Qui chante, oscille, bat, cathédrâle aux oreilles
(Là, ni soir ni matin, ni lune ni soleil)
Les registres profonds de ce deuxième jour.
L’esprit descend vers nous – les bouches cuivrées s’ouvrent –
L’esprit en jaillissant d’un linceul d’eau se couvre.
Voix divine, elle est née que déjà elle meurt.
Je les vois s’échapper, ces longs rubans de sphères.
Leur musique, O mon Dieu, je l’entends et je pleure.
Je l’entends, O Seigneur, le ruisseau sous la mer !
Lire le poème de Vincent dans la revue Possibles (vol. 42, no 1: « Musique et arts pour résister a la déhumanisation » )
Note des compositeurs :
« Into the Depths » a été inspiré par « Le ruisseau englouti ». Nous avons fait écho à l’imagerie musicale du poème avec des sons que seul l’hydroörganon pourrait produire. Nous avons aussi voulu rester fidèle à la nature sexuelle et extatique du texte. Dans ses écrits, Saito encourage la performance simultanée du texte lu (si celui-ci est de nature religieuse) et de la musique du compositeur qu’il adorait par-dessus tout, Bach. C’est exactement ce que nous avons fait.